La région
de Carmaux n'a dû son expansion qu'à la présence
du charbon que renferme son sous-sol et elle doit la découverte
du combustible au cours d'eau " Le Cérou ", qui traverse
la partie nord et qui fit apparaître la première couche
au "rocher du coteau de l'Ecuelle" (lieu de la première
découverte), banc de grés, ou " rocher molard "(terme
local) renfermant plusieurs veines de charbon.
Si l'origine
de l'extraction ne peut être exactement déterminée,
un document ancien, datant approximativement des années 1295,
permet de la situer au XIIIe siècle ; il indique en effet qu'un
droit de péage d'un denier par charge à la traversée
du pont d'Albi était perçu pour le charbon de terre servant
à alimenter les forgerons de la région.
Péage du pont d'albi vers 1290 (Parchemin, AD81)
Jusqu'au
XVIIIe siècle le champ d'exploitation qui se situait à
l'ouest et au nord de Carmaux sur les deux rives du Cérou, avait
tout au plus, du levant au couchant, de 1.200 à 1.500 toises
d'étendue (la toise valant 1,949 m) et à peu près
autant du nord au midi. Dans cet espace on avait creusé plus
de 200 creux ou puits et plus de 300 petites fouilles que les charbonniers
du pays appelaient : caves.
Ainsi le sol était criblé d'excavations dont on réussissait
à grand-peine à arracher quelques lambeaux de gisement.
Ces excavations étaient irrégulières et le manque
d'air forçait les ouvriers à ne pas étendre leur
chantier loin de l'orifice du puits ; d'autre part, les éboulements
étaient trop à craindre pour permettre le creusement de
galeries de grande longueur. Ces modes d'extraction primitifs et défectueux
durèrent jusqu'en 1775 environ.
Durant
cette époque le charbon de Carmaux était transporté
par la route jusqu'à Gaillac où il était embarqué
pour parvenir ainsi par voie d'eau jusqu'à Toulouse et à
Bordeaux où il subissait la concurrence de la houille anglaise.
On évalue à 500.000 tonnes l'extraction totale du charbon
pendant cinq siècles, soit des années 1250 à 1750
et à 100 millions de tonnes depuis le début du XIIIe siècle
jusqu'en 2000, date de l'arrêt de l'extraction du charbon.
DEVELOPPEMENT
INDUSTRIEL AU XVIIIe SIECLE
La famille de Solages, originaire du Rouergue, était représentée
à Carmaux au commencement du XVIIIe siècle par François-Paul
de Solages dont un des deux fils, Gabriel, désigné par
la suite sous le nom de Chevalier de Solages, devait être l'artisan
de l'expansion des Mines de Carmaux. Désireux d'accroître
l'importance de son- entreprise et conscient des difficultés
de transport, il chercha à consommer sur place la plus grande
partie de ses produits ; de là lui vint l'idée de construire
une verrerie à bouteilles pour laquelle il sollicita une concession,
accordée par arrêté du Conseil d'Etat du 2 mai 1752.
Cette verrerie devint le plus grand utilisateur de charbon de l'époque
et nécessita l'exploitation de nouvelles mines.
Un règlement paru en 1744 avait mis un peu d'ordre dans les exploitations
minières ; il assujettissait l'exploitation des mines à
une autorisation préalable et fixait la forme et les dimensions
des puits ainsi que diverses mesures de sécurité à
prendre pour l'extraction.
C'est en vertu de ce Règlement que, par arrêt du Conseil
d'Etat en date du 12 septembre 1752, le Roi accorda au Chevalier de
Solages, pour 20 ans, le monopole de l'exploitation du gisement de Carmaux.
Cette concession devait être prolongée à différentes
reprises et, en 1782, à l'occasion d'une demande de prorogation,
le Chevalier de Solages faisait valoir que les charbons extraits à
400 ou 500 pieds (le pied : 0 m. 3248) de profondeur étaient
d'une qualité reconnue supérieure aux meilleurs charbons
d'Angleterre, que la marine sur la côte de Bordeaux, ainsi que
les manufactures de cette ville, n'en employaient pas d'autre, que la
province du Languedoc retirait de grands avantages de l'entreprise,
que, d'autre part, plus de 200 ouvriers étaient occupés
journellement et qu'enfin avec les charrois et le transport, plus de
500 familles vivaient de la mine. L'usage du charbon de terre s'était
substitué à celui du bois pour la cuisson des briques,
tuiles et chaux, créant ainsi de nouveaux débouchés,
tout en diminuant considérablement le prix de revient de ces
produits.
Dans cette seconde moitié du XVIIIe siècle la plupart
des principales fosses avaient été sérieusement
aménagées ou transformées et nous devons indiquer
la grande part prise dans cette amélioration des méthodes
d'exploitation, de l'organisation du travail et de l'outillage, par
des ouvriers des mines de Flandres guidés par des chefs d'ateliers,
appelés porions, ainsi que par des charpentiers, des boiseurs
et un directeur venus dans le bassin vers 1750.
Nous noterons également la naissance de l'entreprise sidérurgique
du Saut-du-Tarn à la fin du XVIIIe siècle, à la
suite de la découverte d'un gisement de fer dans le canton d'Alban
et de Villefranche, suivie de l'autorisation donnée au vicomte
de Solages d'établir à Saint-Juéry, à 6
km en amont d'Albi, à la chute du Tarn, dite "Saut-de-Sabo",
deux hauts-fourneaux et des forges catalanes.
LES
MINES DE CARMAUX AU XIX" SIECLE
La loi du 21 avril 1810 organisant en France la propriété
minière, vint donner un nouvel essor aux industries extractives
; les concessions qui n'étaient que temporaires devinrent perpétuelles,
disponibles et transmissibles comme les autres biens. Les Sociétés
d'exploitation hésitèrent moins à investir des
capitaux importants dans des travaux de recherches et deç aménagements
dont elles pouvaient escompter recueillir les fruits.
Le 27 mai 1839 commença l'exploitation de la Grillatié,
dont le creusement du puits commencé le 10 novembre 1833, fut
arrêté le 1er mai 1839 à la profondeur de 226 m.
; en 1858 devait être entrepris le fonçage du deuxième
puits mis en communication avec le premier.
En 1857, l'exploitation des mines de Carmaux comprenait huit puits :
du Ravin, Peyrotte, des Caves du Bois, de Saint-Roch ou de l'Ecuelle,
de la Grillatié, des Acacias, de Sainte-Barbe, qui en 1863 devait
atteindre 330 m. de profondeur et devenir le plus profond et le mieux
aménagé, et du Castillan.
En 1872, la Société des Mines de Carmaux, pour répondre
aux besoins de la consommation fit construire, pour la fabrication du
coke, une usine de 80 fours d'un nouveau système pour remplacer
les fours d'un modèle ancien, construits quelque 25 ans auparavant.
En 1878 commença le fonçage d'un grand puits dit : puits
de la Tronquié qui, prévu pour une profondeur de 400 mètres,
fut arrêté en fin juillet 1882 à 386 m. Le puits
de la Tronquié N° 2, en fonçage en 1883 et destiné
au début à l'aérage, fut terminé en 1886
à la profondeur de 304 m.
En 1890, en prévision du moment où le puits de la Tronquié
en pleine exploitation remplacerait celui de Sainte-Barbe, l'obligation
de créer un nouveau centre d'extraction parut nécessaire
et c'est dans ce but que fut entrepris, le 26 juillet 1893, le fonçage
du puits de Sainte-Marie. Les travaux furent arrêtés en
mars 1896 à la profondeur de 340 m. et l'installation du puits
N° 1 fut prête à fonctionner en 1898 et celle du puits
N° 2 en 1901.
A cette époque, la Société des Mines de Carmaux
employait environ 3.000 ouvriers et l'extraction atteignait 500.000
tonnes/an.
LES
TEMPS MODERNES
De 1900 à 1914 les Mines de Carmaux ont poursuivi leur extension,
et les progrès techniques : traction électrique par trolley,
havage mécanique, remblayage hydraulique, électrification
du fond favorisée par l'absence de grisou, marchent de pair avec
l'amélioration de l'organisation du travail, la recherche de
nouveaux débouchés et l'adaptation des produits aux exigences
commerciales.
Un. effort particulier nécessité par la défaillance
des mines du Nord et du Pas-de-Calais pendant la guerre 1914-1918, amena
la production annuelle de 583.000 T en 1914 à 819.000 en 1917
et 850.000 en 1918. Dans les années suivantes, la réduction
des débouchés correspondant à la reprise d'activité
de l'ensemble des Houillères françaises, ainsi qu'à
la diminution des demandes des chemins de fer qui s'électrifient,
provoque une baisse de l'extraction. Cette dernière oscille de
1918 à 1938 entre 550.000 et 700.000 tonnes, le point le plus
bas étant atteint avec 520.000 T en 1936, année où
la crise économique conduit à une réduction sensible
des effectifs (2.536 ouvriers au 31 décembre 1936, soit les 48
% de l'effectif de 1918).
Après cette chute importante, un redressement dû à
une augmentation de l'effectif (3.662 en 1940) et du rendement, devait
permettre d'atteindre, en 1940, la production record de 1.062.000 tonnes.
Les années d'occupation provoquèrent à nouveau
une diminution continue de la production qui atteignit son minimum en
1944 avec 470.300 tonnes, l'effectif restant sensiblement constant.
Le gisement
de Carmaux fut exploité :
- antérieurement à 1752, par les petits propriétaires
;
- de 1752 à 1793, par le chevalier de Solages ;
- de 1793 à fin 1794, par le Comité de Salut Public ;
- de fin 1794 à 1801, par le chevalier de Solages ;
- de 1801 à 1810, par le vicomte de Solages ;
- de 1810 à 1856, par l'Entreprise des Mines et de la Verrerie
de Carmaux, de Solages Père et Fils ;
- de 1856 à 1866, par la Compagnie des Houillères et Chemin
de fer de Carmaux à Toulouse;
- de 1866 à la Nationalisation, par la Société
des Mines de Carmaux.
- de 1946 à 1969 par les Houillères du Bassin d'Aquitaine.
- de 1969 à 1983 par les Houillères du Bassin Centre Midi.
- de 1983 à la fin par les Houillères du Bassin Centre
Midi, Unité d'exploitation Tarn puis Carmaux.
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